Du 30 juin au 3 juillet 2024 à la Ferme de Courcimont
« Bien vieillir » : Notre avis !
La loi Bien Vieillir a été adoptée récemment. Nous aurions aimé être davantage consultés et participer à l’élaboration du texte. Nous saluons les avancées sur le droit d’entrée en établissement avec son animal de compagnie et le droit de visite. Cela doit être garanti, sans conditions, comme à domicile. Au droit de « visite », nous préférons le droit de recevoir qui on veut, quand on veut. En établissement, nous ne sommes pas dans des chambres d’hôpital mais dans des logements. Nous ne sommes pas des patients mais des résidents locataires. Nous devons avoir les mêmes droits et devoirs qu’à domicile.
Nous ne voulons pas être réduits à notre vieillissement, et encore moins à l’image de la vieillesse dans les médias, qui nous effraie et dans laquelle nous ne nous reconnaissons pas. Bien sûr, nous sommes vulnérables, nous avons parfois des handicaps mais nous sommes avant tout des hommes et des femmes, des parents, des grands-parents. Nous voulons être respectés et considérés. La société tend à nous exclure. Il faut aller au-delà des préjugés, faire preuve de bienveillance.
Citoyennage est une démarche ancienne et une association nationale récente, cette création a eu pour conséquence de passer de l’expression locale et régionale à la reconnaissance publique. Nous sommes maintenant connus de l’opinion à travers les médias et reconnus par les pouvoirs publics comme des interlocuteurs valables, même si nous sommes insuffisamment sollicités.
Quel est le point de vue des personnes âgées sur le thème ambitieux du colloque ? Les deux mots « autodétermination » et « enthousiasme » n’apparaissent pas dans les textes produits jusqu’à présent par Citoyennage, mais rien ne nous empêche de les adopter après les avoir analysé, car ils s’inscrivent parfaitement dans notre démarche. Le mot autodétermination pour notre génération, s’appliquait après la seconde guerre mondiale à l’accès à l’indépendance de nos colonies. La façon dont les colonisés étaient traités a peut-être un rapport avec celle dont sont traitées les personnes âgées aujourd’hui. On parlait des africains comme des « grandsenfants » et pour notre part nous sommes parfois infantilisés et certains ont tendance à décider à notre place et parler en notre place.
L’autodétermination qui implique la libre décision et le libre choix, nous convient parfaitement. Elle concerne notre vie de tous les jours comme individus, mais aussi nos choix de citoyens dans la société. Comme pour les anciens colonisés être indépendant, c’est se sentir libre, ne pas subir de contraintes. Ces dernières sont de différentes sortes. Elles sont d’abord matérielles et physiques, mais aussi morales et sociales. Les femmes et les hommes ne subissent pas les mêmes contraintes. La retraite pour celles et ceux qui ont travaillé marque la fin des contraintes justement liées au travail et constitue une rupture importante. Elle est parfois vécue comme une nouvelle liberté, mais parfois comme un grand vide qu’il va falloir remplir avec de nouvelles activités. Dans notre génération les femmes n’ont pas toutes travaillé et n’ont donc pas toujours subi cette rupture. Pour les femmes qui ont élevé des enfants, c’est le départ des enfants qui a marqué une rupture et l’accès à une certaine liberté. Enfin pour la majorité des femmes, la dernière rupture est celle du veuvage qui, bien que douloureuse, a pu leur donner une certaine autonomie.
Dans la vie quotidienne, l’autodétermination se traduit par notre libre décision en matière de soins. Par exemple de notre horaire de lever, ce n’est évidemment pas simple à organiser mais c’est important. Il peut aussi s’agir de la possibilité de refuser un soin qui ne nous semble pas nécessaire ou pas au bon moment, ceci sans aller jusqu’à nous mettre en danger. On en vient enfin à une revendication importante de Citoyennage : la liberté d’aller et venir et de recevoir qui nous voulons quand nous voulons. Il ne faut pas croire que cette demande s’applique seulement aux résidents en établissement, les personnes à domicile peuvent également souffrir de restrictions de leur liberté. Dans tous les cas il s’agit de nous protéger, mais l’autodétermination doit comporter pour nous une certaine prise de risques.
Dans quelle mesure l’autodétermination telle que l’on vient de la définir peut-elle susciter notre enthousiasme ? Dans la bouche des personnes âgées le mot est rare, pour ne pas dire inexistant.
Mais en l’absence de mot c’est notre attitude qui peut en tenir lieu. C’est notre capacité à nous prendre en charge qui manifeste notre volonté de vivre pleinement notre vieillesse. Sans hésiter pour autant à demander de l’aide, car notre entourage ne peut pas toujours évaluer notre besoin. Nous devons être en mesure de choisir nos activités et d’une façon générale notre façon de vivre et ne pas hésiter à le faire. Enfin il faut rappeler que l’essentiel est notre désir de vivre et de participer à la vie de la société, car le temps qui nous reste nous est compté.
« Que devient notre rapport au monde avec l’avancée en âge ? »
En avançant en âge, nous restons pleinement citoyens. Il n’est pas question d’y renoncer ! Nous continuons d’être concernés par ce qui se passe autour de nous et voulons continuer à donner notre avis. Mais il est vrai aussi qu’il n’est pas toujours facile de rester intégrés dans cette société, à nos âges. Nous sommes confrontés à différents obstacles qui peuvent nous conduire à l’exclusion.
« Cultiver la bienveillance, les liens et le dialogue pour faire face à cette époque troublée »
Nous vivons une époque troublée. Le Covid a entraîné une absence de toucher et de contacts. Les liens ont été mis à rude épreuve… Par ailleurs, nous avons reçu et continuons de recevoir beaucoup d’injonctions gouvernementales par rapport à la pandémie, difficiles à suivre. Encore aujourd’hui, nous avons parfois du mal à en saisir le sens.
Les personnels doivent en faire toujours plus avec de moins en moins de temps, ce qui constitue une forme de maltraitance : les budgets sont mal pensés par des décideurs loin du terrain. Partout, on manque de personnel. Mal reconnus, mal payés, ils sont de plus en plus rares à vouloir s’engager et nous en payons le prix au quotidien : instabilité, absences, roulements… Nous nous sentons oubliés des politiques. Où est passée la loi Grand Âge ?
Citoyennage participe à la réflexion interministérielle sur la Liberté d’Aller et Venir en établissement pour personnes âgées, sous la conduite de la DGCS (Direction générale de la cohésion sociale).
En vue de la constitution du rapport du groupe de travail interministériel sur la liberté d’aller et venir (LAV) et après une première contribution adressée lors d’une précédente séance, voici les propositions conclusives de Citoyennage sur ce thème qui nous préoccupe tout particulièrement.