Contribution conclusive Citoyennage groupe de travail interministériel LAV (Liberté d’Aller et Venir)

Citoyennage participe à la réflexion interministérielle sur la Liberté d’Aller et Venir en établissement pour personnes âgées, sous la conduite de la DGCS (Direction générale de la cohésion sociale).

En vue de la constitution du rapport du groupe de travail interministériel sur la liberté d’aller et venir (LAV) et après une première contribution adressée lors d’une précédente séance, voici les propositions conclusives de Citoyennage sur ce thème qui nous préoccupe tout particulièrement.

 

  • Concernant la typologie des mesures restrictives à la LAV, nos échanges complétés par les recommandations du référentiel du Label Humanitude nous amènent à considérer comme telles :
  • Les contentions physiques : barrières de lit, sangles/attaches/gilets, vêtements type grenouillères ou sécuridrap ou autres, fauteuils immobilisés par les freins ou une tablette ou une table, fauteuil en déclive de l’assise ou du dossier, fauteuil coquille, lit contre le mur ou lit bas…
  • Les contentions médicamenteuses
  • Les contentions architecturales (secteur fermé, portillons, barrières de porte/d’escalier, code à l’entrée de la structure ou d’un secteur, portail extérieur à code, enfermement à domicile…)
  • Horaires limitant les entrées ou les sorties
  • Confinement lié à un risque de contagiosité

 

  • Il faudra éviter de procéder à une hiérarchisation ou une classification de ces mesures restrictives, car cela ferait courir le risque de la banalisation de certaines d’entre elles. L’objectif doit être celui d’un « zéro contention ».

 

  • Nous rappelons par ailleurs que l’errance/déambulation des personnes avec des troubles cognitifs sont d’une nécessité absolue pour elles et qu’il ne pourrait s’agir de les en priver.

Il convient de préserver l’intimité des autres résidents par des clés à leur propre porte, comme c’est le cas à domicile et dans un certain nombre d’établissements.

  • Il faut affirmer avec force que la LAV est la règle fondamentale et que les mesures qui viennent la restreindre ne peuvent être que des exceptions.

 

Il s’agira donc de renforcer l’encadrement juridique de ces mesures (proportionnées, adaptées, strictement nécessaires, limitées dans le temps et réévaluées, décidées en collégialité et avec la recherche active du consentement de la personne et de son tuteur, ainsi que de sa personne de confiance). Les procédures devront être suffisamment contraignantes pour décourager la généralisation des restrictions de liberté. Ces mesures doivent être au moins autant encadrées dans les ESMS que dans le secteur sanitaire. Nous pensons même que dans un pays de droit, les vieilles personnes ne devraient pas être enfermées plus facilement que les malades psychiatriques.

 

  • Il est indispensable que les pouvoirs publics s’interrogent sur leurs autorisations, voire même leurs préconisations, à organiser des secteurs fermés dans les établissements pour personnes âgées. Enfermer ne fait que renforcer le désir de sortir. C’est non seulement inefficace, mais délétère et contre-productif.

 

Un service fermé prive de liberté toute personne qui y entre, sans distinction, qu’elle présente ou non une tendance à se mettre en danger par des sorties inopinées, sur la seule base qu’elle présente des troubles cognitifs. Cet enfermement systématique est injustifié et préjudiciable à des personnes qui sont déjà très vulnérables et dont la santé psychique est mise à mal par le sentiment d’être enfermées.

 

Il existe aujourd’hui des systèmes de géolocalisation qui peuvent être des alternatives à l’enfermement. Ce sont des mesures individualisées, qui répondent bien mieux aux critères de proportionnalité, d’adaptation, de stricte nécessité et de limitation dans le temps que la fermeture d’un secteur pour tous ses habitants. Il faudrait promouvoir ces dispositifs et encourager leur développement.

 

De plus, l’exemple de certains services ouverts accueillant des personnes avec des troubles cognitifs montre que les sorties n’y sont pas plus nombreuses, ni plus risquées que dans les secteurs fermés qui ne garantissent d’ailleurs jamais une sécurité totale.

 

N’oublions pas par ailleurs que le droit au risque est une composante fondamentale de l’exercice de ses libertés.

 

  • Généraliser l’annexe 3-9-1 au contrat de séjour et la rendre obligatoire nous semble être une première mesure à prendre rapidement.

 

  • Renforcer les pouvoirs des CVS (à l’instar des commissions d’usagers) et développer l’information et la formation de leurs membres nous paraît également de nature en faire des lieux de recours et de vigilance quant à la LAV.

 

  • La possibilité d’un recours externe doit également être renforcée. Le rôle des « personnes qualifiées » pourrait être développé. Il en est de même pour les « personnes de confiance » qui devraient être plus systématiquement désignées.

 

  • En matière de sécurité et de liberté, il est important de ne pas faire de distinctions entre les droits des citoyens vivant en établissement et ceux des citoyens vivant à leur domicile.

Il faut pouvoir être chez soi en établissement comme on l’est à domicile. Les maltraitances et les atteintes aux libertés doivent être combattues partout de la même manière.

 

  • Enfin, la première des nécessités pour préserver la LAV et l’ensemble des droits des citoyens âgés de notre pays est de leur permettre d’être accompagnés, lorsque cela devient nécessaire, en établissement comme à domicile, par des professionnels en nombre suffisant, et bien formés. Ce qui n’est actuellement pas le cas.

                                                                                                                                                 Février 2022