Synthèse du colloque Citoyennage Île de France 2007

COLLOQUE CITOYENNAGE 2007
Avec le soutien de la CNSA

« Vivre et agir ensemble aujourd’hui et pour demain. »

«  On vit en maison de retraite, mais on n’est pas en retrait de la vie ».

L’entrée en maison de retraite ne constitue pas une fin. C’est un nouveau démarrage, l’entrée dans une nouvelle étape qu’il s’agit de vivre pleinement. Même si certaines modalités ont changé, il s’agit de rester nous-même, de continuer à être actifs.

Tout d’abord, on se sent vivre tant qu’on se sent libre.

Nous n’abdiquons pas notre liberté et, même si sur certains points nous avons besoin d’aide, nous voulons rester libres.

 

Nous voulons garder notre liberté de mouvement, rester libres d’aller et venir, de sortir et de rentrer dans la maison, même le soir.

 

Nous voulons rester libres de penser et de nous exprimer, sinon, on devient des objets. Mais nous respectons aussi la même liberté chez les autres.

 

Nous voulons rester libres de nos choix. Le choix primordial est celui d’entrer en maison de retraite. C’est très souvent un choix uniquement «  de raison » mais nous devons le décider nous-même. Puisque nous vivons plus longtemps, nous devons rester libre de choisir notre vie.

 

Nous devons aussi garder notre curiosité et nous intéresser à tout ce qui se passe dans le monde. Parfois, ça va trop vite et on se sent désarçonné. Mais c’est aussi parce que nous sommes devenus plus lents. Le monde évolue depuis toujours. Il faut l’accepter. On ne peut pas revenir en arrière.

 

Nous avons à rester ouverts aux informations données par la radio, la télévision et les journaux. Nous sommes toujours concernés. Cela nous permet d’en parler avec notre entourage. Les livres et le cinéma peuvent nous sensibiliser à ce qui se passe aujourd’hui, comme le réchauffement climatique par exemple. On peut aussi se mettre à Internet pour rester dans le coup.

Ce qui est important c’est de conserver nos passions et pourquoi pas d’en découvrir de nouvelles, même si on a déjà beaucoup roulé sa bosse.

Il faut aussi être capable de changer de centres d’intérêts quand nos capacités physiques évoluent.

Bref, il faut que ça bouge. Communiquer et participer avec les autres est primordial. Il faut s’obliger. Seul, on s’ennuie. Et pour se sentir vivant, il est important de ne jamais s’ennuyer.

C’est pourquoi l’animation est un « souffle de vie ». L’une de nous en témoigne bien : « ma vie a changé grâce a l’animatrice, j’ai quelque chose a faire toute la semaine. Je ne suis plus en retrait de la vie, je suis même repartie en vacances. J’étais comme une tasse de porcelaine cassée, maintenant les morceaux se recollent peu à peu. »

D’autre part, pour notre moral, c’est essentiel de rester coquet et coquette. La coiffeuse et l’esthéticienne nous aident à nous sentir bien dans notre corps.

 

Ne pas être en retrait de la vie, c’est aussi garder des contacts.

Il faut souhaiter que dans tout établissement, les meilleures dispositions soient prises pour faciliter la venue des familles et des amis. Nous avons besoin d’être entourés et les échanges avec les jeunes générations maintiennent le désir de garder une « certaine forme ».

Les contacts avec le personnel ont aussi une très grande importance. Un esprit de famille peut s’instaurer. On connaît souvent leurs enfants, leurs soucis de famille, en toute discrétion. Cela permet de mieux se connaître. Lorsque leur contrat se termine nous les regrettons. Il faut alors refaire connaissance et c’est toujours difficile, cela demande du temps. Il faudrait moins de changement de personnels.

Etablir des contacts entre nous est indispensable. Nous vivons tous ensemble en communauté.

Même si nous avons des origines diverses cela peut être une occasion de s’enrichir mutuellement si on apprend à s’ouvrir aux autres et à supporter ce qu’on ne comprend pas. Les différences s’estompent quand on apprend à se connaître. Echanger entre nous, nous permet de nous ressourcer. C’est donner et recevoir. Dans une grande collectivité, il est inévitable que des groupes se forment par affinités, mais l’attention portée à ceux qui s’isolent crée un climat de paix et même de joie. Cela évite que certains soient exclus.

Les animations sont une occasion de se connaître et de créer des liens de sympathie. C’est un moment convivial qui favorise une ambiance agréable et détendue.

Il faut aussi faire attention aux personnes qui perdent la mémoire. Etre complètement mélangés est difficile, surtout au moment des repas et de la nuit. Mais être complètement séparés n’est pas bon non plus. Il faut trouver un « entre-deux », qui permette d’avoir des contacts.

Il faudrait aussi développer les contacts avec d’autres résidences. Avoir des activités en commun, des voyages.

 

Les contacts avec l’extérieur sont indispensables.

Les maisons de retraite ne doivent pas être des cocons.

Il est important de participer à des sorties pour conserver une vie sociale. Nous voulons rester intégrés dans la vie de notre quartier.

Les échanges avec les écoles sont également très importants. On sent que les jeunes s’intéressent à nous. Le flambeau commence à se passer entre les générations. C’est encourageant pour l’avenir.

Il faut également faire des opérations portes ouvertes pour faire connaitres les lieux où nous vivons et rencontrer nos voisins de quartier.

 

Nous devons aussi agir ensemble et nous entraider.

Nous souhaitons rester impliqués et actifs tant que cela est possible, dans notre vie et dans ce qui se passe autour de nous. Pour rester vivant, il faut continuer à être utile. Comme cette femme de 104 ans qui pousse le fauteuil roulant de sa voisine.

Cela implique un respect mutuel et une entraide réciproque. A partir de là, chacun peut apporter sa pierre à l’édifice, pour s’aider à vivre debout jusqu’au bout.

 

Nous devons nous montrer particulièrement solidaires avec les nouveaux résidents, avec les personnes handicapées et avec les personnes isolées.

 

Arriver en maison de retraite est une chose difficile. Au début on a besoin d’une personne plus ancienne pour nous guider. Il faut donc que les « anciens » accueillent les nouveaux venus et leur expliquent la vie de la maison. Il est souhaitable de leur présenter les activités, les animations en donnant envie aux nouveaux de s’intégrer, de participer à la vie active sans en faire une obligation.

 

Nous pouvons aussi aider les personnes moins valides à se déplacer, à se repérer. Sans perturber le travail des aides-soignants, rappeler les horaires aux personnes qui perdent la mémoire, faire attention à eux et prévenir le personnel en cas de besoin. Aider un résident perdu dans un couloir, l’aider à retrouver sa chambre ou son bâtiment (cela arrive souvent…).

 

Il faut aussi faire attention aux personnes isolées, aller vers elles pour qu’elles ne restent pas trop seules.

 

Mais il faut rester prudent dans l’entraide, et ne pas faire à la place de l’autre. Aider oui, mais pas se substituer. Evitons d’être des « charitables inconscients ». Chacun doit rester libre de choisir le mode de vie qui lui convient en respectant la liberté des autres.

 

Nous pouvons également agir avec les personnels.

 

Nous entraider les soulage, car ils est peu nombreux. Quand on le peut, c’est bien de pouvoir participer aux tâches quotidiennes. Par exemple, aider à la préparation du petit-déjeuner, mettre la table. A condition qu’on ne nous interdise pas toutes les choses qu’on ferait spontanément. Parfois, on nous dit « ce n’est pas à vous de le faire, le personnel est là pour ça ». Et nous, alors, pourquoi nous sommes là ? Pourquoi nous en empêcher si ça nous amuse de mettre la main à la pâte.

Nous devons aussi agir avec le personnel pour défendre les emplois. Nous devons leur faire sentir que nous sommes solidaires avec eux pour assurer la bonne marche de la maison. Peut-être devrions-nous envoyer une pétition aux responsables politiques ?

 

Nous pouvons aussi agir avec la direction.

 

Nous souhaitons garder des responsabilités, même si elles sont limitées. Nous ne voulons pas être assistés sur tous les plans.

Nous souhaitons être informés des décisions qui sont prises par les directeurs. Nous comprenons leurs difficultés et leurs contraintes. Nous voulons être plus impliqués, non pas pour nous opposer  ou leur demander de se justifier, mais pour comprendre. Il faudrait renforcer nos relations avec eux.

 

Les Conseils de la Vie Sociale sont une bonne chose mais ils sont peu fréquents et peu d’entre nous y participent. Nous sommes mal informés.

C’est pourquoi, il est important de créer partout des Conseils de Résidents ou d’autres types de rencontres avec les directeurs. Nous nous sentons alors considérés comme des gens responsables. Sinon, nous avons l’impression d’être « sur une voie de garage ». Nous espérons que ce colloque Citoyennage permettra de diffuser des mesures concrètes comme celles-là.

 

En conclusion, nous avons participé à construire le monde d’aujourd’hui. Notre génération a souvent ouvert le chemin. Aujourd’hui, nous voulons témoigner de notre expérience. Nous devons faire un travail de mémoire pour transmettre nos racines et aider à construire le monde de demain.

Cela permettra peut-être aux jeunes de ne pas avoir peur de vieillir et de garder le moral…